1er prix : Valérie Tonnelier |
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Le vieil homme et l’oiseau.
Puisque la vie est ici, là je resterai Puisque la vie est ici, là je t’attendrai Puisque la vie est ici, là je te verrai Puisque la vie est ici, là je déploierai |
2ème prix : Elodie Delfa |
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Le perdant magnifique
Il avale des yeux la foule dominicale, Comme Montmartre est belle un matin de Dimanche ! Il joue un air d’avant, de la valse musette, Mireille du bistrot, vieille amie de toujours, Mais la course du temps à présent l’a vaincu. Son âme sœur, sa douce, son adorée, son tout |
3ème prix : Tiphaine Hadet |
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De samedis soirs d’été en lundi de novembre Une mélodie chantée, et des corps qui se cambrent Derrière chaque fenêtre, les artistes composent Des pinceaux qui font naître, et des pianos qui osentUn endroit qui chavire, au front d’la capitale Une rue qui inspire, sous un air pas banal Satie dans son placard, au coin de son effroi Une butte pleine d’histoire, et nos cœurs ici-bas De douces mains qui sculptent en courtes jambes qui courent Quelle que soit son époque, ce quartier nous enivre Il n’y a plus personne au coin de cette rue Il n’y a plus personne au coin d’la rue Cortot Je regarde ce dos à l’abri de Montand |
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4ème prix : Luciano Cavallini |
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Madame Louise
Elle venait de terminer son savonnage, de distribuer le courrier et les journaux, de garnir la mangeoire du canari et de consoler la locataire du premier en rupture de couple. On l’appelait Madame Passe-Partout. Dans le quartier tout le monde s’en servait, le seul instant de repos qu’elle s’octroyait, c’était celui en fin de matinée, lorsqu’elle regardait la rampe d’escaliers menant ailleurs et plus loin. Ce devait être mieux en bas, plus coloré, il devait y avoir plus d’amour et d’humanité. Elle attendait que les lattes du parquet séchassent, en faisant mijoter son pot-au-feu, longuement, avec bien plus de légumes que de viande. Le cirage prenait lentement, et le savon noir collait dans les angles du bâtiment. Elle devrait encore courber l’échine sur les seuils, entendre le bonheur des autres murmurer derrières les paliers, quelques rires, un enfant qui pleure, la radio, un vieux disque vinyle, entre Brel, Barbara, et plus loin, beaucoup plus loin, l’appel du Général de Gaulle… Elle voguait ainsi toute seule, entre les pierres de Montmartre, et les grands volubilis de fer forgé, fleurissant leurs yeux de verre exsangues sous la marquise du métro Abbesse. Elle avait caché des juifs. Elle avait connu les caves de la Gestapo, rue de la Pompe, faisant partie de ses hurlements sourds que l’on avait jamais entendus, enterrés sous la plus banale normalité de la petite histoire. |
5ème prix : Jean-Charles Paillet |
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Aurons-nous le temps de passer D’une rive à une autre De poser un pied sans se noyer Sans toucher le fond Si ce n’est de nous-mêmeAurons-nous le temps de poser Un autre regard sur un autre visage La nuit arrive si vite Et les heures ne se remontent pas Fragile fuite en avant À chacun de nos pas Aurons-nous le temps d’aimer Aurons-nous simplement le temps de vivre En aurons-nous le temps ? |
6ème prix : Jacqueline Perriniaux |
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Reflets
La réalité implacable. La déception amère. Le rêve brisé. Au péril de leur vie et au bout de tant de souffrances ils sont finalement arrivés dans la Ville Lumière, la capitale de l’art de vivre, la plus belle ville du monde. L’ardeur et l’espoir renaissaient après ces mois atroces mais n’ont duré qu’un instant. Le Paris qu’ils ont découvert n’est plus qu’un pauvre reflet des posters et des images qui les attiraient comme des aimants. On n’y vit plus qu’en noir et blanc, avec une gamme infinie de gris et d’ombre. A défaut de pouvoir s’intégrer dans cette ville cosmopolite ils se retrouvent entre eux et voient exprimés dans le visage de l’autre le désespoir et la résignation qu’ils ressentent. Leur nouvelle misère se reflète à son tour dans les flaques sous la pluie incessante. Leur soleil brûlant leur manque et le soleil occidental ne se lève toujours pas. |
7ème prix : Christophe Hassler |
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J’entends le bruit des vagues et le cri des mouettes Je regarde cette mer s’étendre à l’infini Et mon esprit s’évade, remonte les décennies Je revois ce séjour de mai soixante dix septNous nous étions enfuis comme deux adolescents Nous faisant porter pâles, laissant tout derrière nous Rouler toute la nuit, rejoindre le Lavandou Et voir naître le jour, heureux et frissonnants Je revois ces images, et j’entends ce refrain Aujourd’hui je suis seul, le mal t’a emporté |
8ème prix : Evelyne Cosserat |
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Du haut d’un réverbère
Installé là depuis cent ans, J’ai vu dévaler des poussettes. J’ai éclairé bien des chagrins, Mais le plus beau jour de ma vie, Par tous les temps, toutes les nuits, Ah j’en verrai passer des gens, |
9ème prix : Catherine Chaboissier |
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Temps contre temps
Sur le sable, la mer a dessiné le temps |
10ème prix : Geneviève Casaburi |
Thesaurus Pirata
Il cherche dans les flots, les vagues déchaînées, |
11ème prix : Jean-Philippe Miginiac |
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J’ai retrouvé dans ma mémoire ce troquet hospitalier où un musicien cannibale se rassasiait de notes bleues. Son blues sentait le souffle rauque des nuits urbaines, les sonorités crépusculaires, les brumes incertaines, et son swing reniflait les riffs de mes ténèbres. Sa trompette exhumait hors de cales lugubres et profondes un chant aux lunes furieuses, un long cheminement de tempos brisés et de notes en sourdine qui erraient entre les tables, bras tendus comme des somnambules.
Une vieille femme traînait au bar une odeur d’absinthe, un visage fané, gris de cire, et les images de ses souvenirs. Elle s’enivrait à toutes petites gorgées d’envie de petits bouts de sa vie qui coulaient d’une bouteille magnifique, remplie d’histoires romantiques, et caressait du basalte de sa voix fêlée les sons que la trompette venait partager avec le vin noir de ses mélodies distillées. |
12ème prix : Laura Maxwell |
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Février. Fin d’après-midi. Les ombres des platanes nus s’étirent sur le trottoir. Anna traverse le boulevard et rentre dans la cabine.Elle ne sait pas que je l’ai suivie. Au téléphone, elle semble inquiète, jetant des regards nerveux autour d’elle, une main appuyée sur la vitre, le bracelet que je lui ai offert à son poignet.
Maintenant, ses lèvres ne bougent plus ; elle regarde fixement du côté du trottoir. A présent, les ombres noires des platanes se cassent au pied de la façade de l’immeuble. La lumière froide traverse les vitres souillées de la cabine. Le récepteur, décroché de sa base, pend comme une tête renversée, celle d’Anna quand je l’étreins et la fais glisser au bord du lit. En direction de la porte, ils marchent enlacés. La vue de cet homme entourant les hanches de ma femme éclate ma poitrine comme sous l’impact d’une balle dum dum. Je murmure sans voix : – Ôte tes mains de ce corps.. Leur tandem est une bombe phosphore qui me brûle de l’intérieur. Je chancèle. Un réflexe. Un geste involontaire me redresse. Comme une arme, je pointe sur eux mon objectif, déclenchant le dernier cliché de mon amour. |
13ème prix : Stéphane Prat |
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Des corbeaux au plafond.
Un pan entier de son immeuble avait été arraché, au petit jour, sans préavis. Jean Chesnais s’était levé machinalement et avait constaté l’ampleur des dégâts, encore travaillé par un rêve assez absurde, mais qui se déroulait sur une lande infestée de corbeaux, et qui lui laissait dans l’esprit un goût plutôt agréable, iodé. La coupe avait été nette, dans son immeuble. Habituellement, quand un événement inattendu le poussait à passer la tête par sa fenêtre, il retrouvait son voisin, Gustave Le Manc, accoudé au rebord de sa propre fenêtre. Et le plus souvent ils se mettaient à parler de tout, sauf de l’événement inattendu qui les avaient fait sortir la tête de leur appartement. Mais ce matin , Gustave Le Manc faisait corps avec l’événement inattendu : il avait disparu avec son appartement, avec l’appartement de dessus, avec celui du dessous. Et Jean Chesnais, faute de conversation, finit par se rendormir sur le rebord de sa fenêtre, sur sa vision impossible, des corbeaux au plafond. |
14ème prix : Annie Pellet |
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Moitié, moitié
Ce matin de Février, il faisait froid. Frissonnante, je me suis glissée dans la photo, je suis allée boire un café rue des Saules, en regardant au travers des vitres impeccables, cachée dans l’ombre des pancartes extérieures, je me suis réchauffée à moitié. Dans mon moi chaud, plus proche, plus gaie, se lovait la boutique verte. Verte? Pas vraiment! Multicolore plutôt. Habillée des rouges, des jaunes, des couleurs chatoyantes, flamboyantes de Toulouse-Lautrec, le Montmartre du french-cancan offert pour quelques sous aux touristes nostalgiques de la Goulue, de Jane Avril, du coup d’pied à la lune et de la fanfreluche indiscrète révélant un éclair de chair interdite au pékin énamouré. Nostalgie de l’époque virevoltante, frémissements d’un nouveau siècle, promesses oubliées d’un monde effervescent… Comme s’il suffisait de monter deux ou trois marches bétonnées pour se réfugier dans l’obsolescence insouciante et abandonner la réalité inhospitalière… |
15ème prix : Sophie Piquet |
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C’était elle
Il est là, sur cette place. |